Les populations du district de Katougouma dans la sous préfecture de Tanènè, préfecture de Boké vivent essentiellement de l’agriculture, de la pêche et de l’élevage. Des activités héritées de leurs aïeux. Si lesdites activités subvenaient jusque-là, à leurs besoins vitaux. Aujourd’hui, tel n’est plus le cas, ce, depuis la construction d’un port minéralier dans la localité.
El hadj Karamba Bayo est un paysan et troisième imam de la mosquée du district de Katougouma, ce dernier, a confié à notre reporter que les habitants dudit village sont en majorité des cultivateurs et que les autres activités: pêche, élevage viennent en appoint pour les besoins familiaux. L’imam de faire remarquer de passage que la construction d’un port minéralier par la Société minière de Boké dans leur village, il y a 8 ans de cela, a complètement changé la donne: « Vous savez, ils ont construit le port sur le fleuve du Rio Nunez et nous, nos champs longent ledit fleuve. Lorsqu’ils prennent la bauxite dans les carrières, ils la transporte au port ici et les bateaux viennent prendre. Nous ne savons pas comment ils font, mais nous avons toujours de l’huile dans nos rizières. Surtout pendant les cinq premières années et cela a occasionné une baisse drastique de nos rendements. On a presque pas connu la moisson et ça c’est grave pour une famille», a fait savoir le paysan Karamba Bayo.
De l’autre côté du même village, un bras du même fleuve sert de ligne de démarcation à la sous-préfecture de Kalaboui à celle de la localité sous-préfectorale de Tanènè. Là, la coupe de palétuviers, de mangroves et la pêche préoccupent des citoyens. A l’image de Amara Sampil, un quinquagénaire, ancien pêcheur reconverti en coupeur de bois. « Je faisais la pêche, mais j’ai abandonné les filets au profit de la coupe du bois. Parce que nos eaux ne regorgent plus de poissons. Au lieu de passer le reste du temps en famille, alors que j’ai des enfants à nourrir, je me suis reconverti dans la coupe du bois», a déclaré Amara Sampil.
Pour sa part, Souleymane Camara, la vingtaine de préciser qu’il accompagnait de temps en temps son papa pour pêcher: « Mon père ne vient plus maintenant, parce que pour avoir quelques poissons actuellement, il faut être très patient, nos eaux n’ont plus de poissons. Nous les enfants, on supporte de rester longtemps, afin de pouvoir prendre un peu de poissons, mais nos parents tel n’est plus le cas », a expliqué le jeune Souleymane Camara.
A l’en croire, avant que les sociétés minières ne s’implantent dans leur village, leurs eaux étaient très riches en ressources halieutiques. « Quand mon papa venait pêcher, au retour, il nous faisait appelle pour l’aider à transporter la quantité de poissons prise, mais aujourd’hui, c’est un vieux souvenir. Regardez, depuis 4 heures, je suis là, voici ce que j’ai pu attraper.»
Contrairement à la Société minière de Boké, mais aussi la direction préfectorale de l’Environnement des eaux et forêts de Boké, où notre reporter a contacté les responsables des deux entités, afin de recouper les préoccupations soulevées par les riverains du port minéralier de Katougouma. Le secrétaire général chargé des collectivités de la préfecture de Boké, Jean Béavogui, nous a confié que les problèmes que les paysans ont évoqués ont été remontées autorités compétentes, afin de remédier à cet état de fait.
Il convient de souligner que des études ont été menées par certaines organisations non gouvernementales, notamment de Human Rights Watch, qui a rendu public en octobre 2018 une étude sur l’impact de l’exploitation minière sur la biodiversité dans cette partie de la République de Guinée. Une étude dont les recommandations n’ont jamais fait l’object d’application sur le terrain.
Richard TAMONÉ du retour de Katougouma/Boké