« À l’heure où les gouvernements ont commencé à assouplir leurs mesures de confinement, on se rend compte avec force que nous devrons vivre avec ce virus pendant un certain temps », a déclaré Dr Matshidiso Moeti, Directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique, lors d’une conférence de presse virtuelle depuis son siège à Brazzaville (Congo).
Au moment où des mesures d’assouplissement anti-confinement surgissent çà et là, la branche africaine de l’OMS a appelé à la vigilance.
« Avec l’ouverture des frontières, il y a des défis pour détecter et gérer les cas importés, et de maintenir l’intensité des mesures de santé publique alors que les activités économiques reprennent », a détaillé la Dr Moeti, tout en prônant des mesures au niveau individuel et communautaire.
« Par nos actions et nos choix individuels, nous jouons tous un rôle dans la résolution de ces défis », a-t-elle ajouté, invitant les citoyens du continent à se joindre à elle pour pratiquer et promouvoir les actions préventives qui sauvent des vies.
La Cheffe du Bureau de l’OMS pour l’Afrique réitère ainsi certains fondamentaux développés depuis le début de cette pandémie, à savoir le port du masque, le lavage fréquent des mains et la distanciation physique. Et dans ce combat contre le nouveau coronavirus, les pays et les communautés montrent la voie en proposant des solutions à de nombreux défis de cette réponse.
C’est le cas au Nigeria où « le plaidoyer des chefs de communauté a encouragé plus de gens à se faire dépister ». En Mauritanie, des étudiants universitaires contribuent à l’intensification de la surveillance. Et selon l’OMS, le Kenya a de son côté formé plus de « 79.000 agents de santé communautaires et 15.000 jeunes champions, qui ont sensibilisé 17 millions de personnes ».
L’Afrique est le 2ème continent le moins touché
« Du Bénin au Zimbabwe, les pays intègrent la Covid19 dans les systèmes d’information géographique sur la polio afin de fournir des informations en temps réel pour la prise de décision », a fait valoir la Dr Moeti.
Au Ghana, les autorités sanitaires ont misé sur les drones « pour transporter des échantillons » et « l’approche commune des tests a rapidement augmenté ses capacités ».
« Je reconnais que les ménages africains ont besoin d’un soutien au-delà du secteur de la santé pour pouvoir jouer leur rôle, en particulier les ménages à faible revenu », a poursuivi la Cheffe du Bureau de l’OMS pour l’Afrique, qui lance aussi un appel aux gouvernements et aux partenaires internationaux pour qu’ils apportent cette aide.
Avec plus de 992.000 cas et près de 21.600 décès, l’Afrique est le deuxième continent le moins touché, devant l’Océanie. Et les chiffres actuels dans la région représentent 5 % des cas confirmés de Covid-19 et 1,9 % des décès signalés dans le monde.
L’Afrique, aux systèmes de santé les plus fragiles, est beaucoup moins touchée que l’Asie, l’Europe et les Amériques. Et la catastrophe sanitaire tant annoncée n’a pas encore eu lieu. En réponse à une question d’un journaliste sur ces « prévisions alarmistes », la branche africaine de l’OMS note que ces scénarios se sont fondés sur différents cas de figure, notamment les transmissions de cas communautaires.
« Les pays africains ont pris très tôt les mesures de confinement et cela a réduit les cas de contamination », s’est défendu le docteur Michel Yao, responsable des opérations d’urgence pour le bureau régional de l’OMS en Afrique.
« Mais ces prévisions peuvent être réelles si des mesures ne sont pas prises », a-t-il ajouté, considérant cet appel comme « un signal d’alarme ». « On se félicite que ce cas de figure s’est révélé faux », a insisté le Dr Yao, plaidant toutefois pour le maintien et un renforcement des mesures de protection, notamment le port du masque et la distanciation physique.
Au cours de ce point de presse virtuel, le Niger est revenu sur la stratégie adoptée pour « gérer la maladie ». Cet « engagement politique au plus haut niveau » s’est traduit par l’élaboration d’un plan de riposte avec une quarantaine de mesures pour freiner le virus.
Outre la fermeture des écoles et la sensibilisation des moyens de protection individuelle, Niamey a aussi fermé ses frontières dès l’apparition des premiers cas sur le continent africain.
L’autre volet a consisté à s’entourer de toutes les précautions pour mettre en œuvre ces mesures de lutte, notamment l’état d’urgence.
« L’état d’urgence est presque une confiscation des libertés », a ainsi affirmé le Dr Idi Illiassou Mainassara, Ministre de la santé du Niger, relevant qu’une « situation de pandémie est presque une situation de guerre ».
Selon l’OMS, le Niger recense 1.152 cas confirmés de Covid-19 dont 69 décès.
Du côté du Rwanda, les autorités sanitaires ont plutôt parié sur la « décentralisation de la riposte », avec un renforcement de la réponse à l’échelon des districts avec des structures opérationnelles.
Kigali a su aussi user des nouvelles technologies pour limiter l’usage du papier par les équipes de terrain lors de la détection et du traçage des cas suspects.
Selon le Dr Daniel Ngamije, Ministre rwandais de la santé, son pays a privilégie l’échantillonnage groupé des tests de Covid-19. Au lieu de tester une personne à la fois, les échantillons de plusieurs personnes sont rassemblés et testés en un seul groupe. Si le test groupé est négatif, tous les individus du groupe sont déclarés négatifs. Mais s’il est positif, chaque membre du groupe est alors testé à nouveau individuellement pour que la personne infectée soit identifiée.
Avec environ 2.104 cas confirmés et seulement cinq morts depuis le début de l’épidémie pour une population de plus de 12 millions d’habitants, le Rwanda, l’un des pays les plus densément peuplés d’Afrique, semble avoir jusqu’ici contenu la maladie avec succès.
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