Deux jours d’intenses travaux (mercredi 23 au jeudi 24 novembre 2024) ont permis aux femmes leaders du Cameroun, du Burkina Faso, du Sénégal, de la Côte d’Ivoire et de la Guinée d’échanger, d’apprendre et de se réconforter sur tout ce qu’elles sont confrontées dans leurs communautés respectives à cause des projets miniers qui impactent leurs modes de vie. « Les femmes africaines et leurs communautés disent non aux projets nuisibles », a été le thème principal.
« Nous sommes en Guinée avec le CECIDE (Centre du commerce international pour le développement) parce que nous travaillons, pour soutenir les revendications des femmes qui sont impactées par les projets miniers. Et quand nous disons projets miniers, nous savons que la mine, elle est bien mais si les impacts de la mine sont tellement négatifs sur les communautés, les empêchent d’avoir de l’eau potable, un environnement sain. Nous devons travailler avec ces femmes pour réclamer leurs droits », introduit Géorgine Kénié de l’ONG Alliance africaine genre contre des industries extractives qui polluent et qui détruisent basée en Afrique du Sud.
Pour l’actrice des droits humains, cette visite d’échanges est bénéfique pour elles: « En ce sens que nous venons apporter la solidarité aux femmes guinéennes de Boké, de Madina Tahiré, nous les apportons notre message de solidarité pour leur dire qu’elles ne sont pas seules. Nous savons qu’elles passent des moments difficiles et qu’ensemble nous pouvons pacifiquement réclamer leurs droits », a indiqué la dame camerounaise de la société civile.
Puis de préciser: « Je ne suis pas venue seule, suis venue avec d’autres femmes qui sont soutenues par le Réseau des femmes de l’Afrique Centrale et de l’Ouest, qui luttent également contre ces impacts négatifs de la mine dans leurs localités. Donc les femmes sont venues de la Côte d’Ivoire, du Cameroun, du Burkina Faso, du Sénégal pour apporter des messages de solidarité à nos collègues Guinéennes. »
Interrogée sur la visite de terrain effectuée sur le site des communautés impactées par la construction du barrage de Souapitti: « Nous avons trouvé des femmes malgré les conditions de vie difficiles très joyeuses, mais la joie de ces femmes est affectée, parce qu’elles vivent dans des campements qui n’ont pas d’électricité, alors que l’électricité est générée à partir leur localité. Elles n’ont également pas d’eau potable, de terres, dont elles n’ont plus accès pour leur culture. Nous savons que chez nous en Afrique, la terre est propre à leur culture. Et quand nous sommes dépossédés de nos terres, nous perdons notre culture. Ces femmes ont besoins de leurs terres pour les activités agricoles, elles ont besoins de l’eau, de l’électricité pour que les enfants soient formés, apprennent à lire leur devoirs et deviennent des personnes que nous voulons voir dans la société demain », a-t-elle déclaré.
Concernant le respect du cahier des charges des entreprises notamment minières, la dame de souligner ceci:  « Nous revenons du terrain avec un message fort à l’endroit des compagnies minières. La redevabilité de ces compagnies minières envers ces communautés, nous voulons qu’elles prennent en charge leurs responsabilités et que toutes les demandes de ces femmes soient prises en compte », a-t-elle fait savoir .
Parlant du guide pour les communautés, Géorgine Kénié a indiqué les communautés riveraines des industries extractives qui connaissaient déjà leurs droits: « pendant cette visite d’échanges, vous avez entendu dire des femmes de travail décent, qu’elles ont droit à l’éducation, droit à la vie, à l’héritage. Donc le guide léger à tout simplement donné l’opportunité aux femmes de comprendre quelles sont les voies de recours pour réclamer certains de ces droits auxquels, elles courent encore après. Pourtant ces droits sont inscrits dans la Déclaration universelle des droits de l’homme que nous connaissons depuis 1948; dans nos Constitutions; également dans les codes miniers de ces pays. Nous connaissons que les compagnies minières n’ont pas la volonté de mettre en application ces lois. Et ces femmes connaissant leurs droits, elles ont compris aujourd’hui quelles sont des voies de recours, quels sont les articles dans la Constitution, du code minier qui peuvent soutenir leur combat », a-t-elle signifié.
De son côté, la présidente des femmes transformatrices des produits halieutiques et vice-présidente de l’ONG Lumière synergie pour le développement du Sénégal, Fatou Samba de faire remarquer qu’avec leurs collègues des autres pays africains impactées par l’exploitation minière: « on a trouvé nécessaire de venir prêter main forte à nos soeurs guinéennes pour qu’elles sachent comment mener le combat. Nous au Sénégal, il y a l’installation d’une centrale à charbon. Donc pendant 18 ans, nous sommes en train de nous battre pour ça. Aujourd’hui, on a des acquis, parce qu’on a obligé à l’État du Sénégal et à la Banque qui a financé la centrale à charbon de ne plus financer l’installation d’une centrale de charbon en Afrique. On est victime, c’est vrai, mais on a réussi à obtenir l’annulation des financements en cours », a fait savoir Fatou Samba.
La présidente des femmes impactées du barrage de Souapitti de Bangouya, Hawa Camara, une localité de région administrative de Kindia de préciser: « On était au bord de la route qui mène vers la préfecture de Télémélé, avant les travaux de construction du barrage de Souapitti. Aujourd’hui, cette route est barrée; ensuite toutes nos terres, qui nous aidaient à faire les travaux agricoles, elles sont envahies par les eaux, mais presque l’indemnisation n’a pas pris en compte tous les dommages. Nous les femmes, là où on pouvait faire  les travaux de potager, et qui nous permettaient de couvrir certains besoins de familles, aujourd’hui nous ne pouvons rien entreprendre à cause non seulement de l’envahissement de l’eau, mais aussi le manque de route. Pis, nous sommes victimes de morsure de reptiles de tout genre, alors que nos centres de santé  qui existent manquent de tout », a pour sa part expliqué la présidente des femmes impactées de Bangouya.
Dans la même veine, Hawa Camara de souligner: « l’autre souci que nous avons est que nous ne parvenons pas à retenir nos enfants. Beaucoup sont morts déjà  dans le desert du Sahara et dans la mer méditerranée. Parce qu’ils nous voient souffrir, et eux-mêmes, ne peuvent plus entreprendre. Pour eux, c’est l’exil la solution. C’est pour cette raison, nous saluons à juste titre cet atelier. Nous remercions nos soeurs africaines et CECIDE pour cette formation. Elles nous ont montré beaucoup de choses qui vont nous aider désormais », a conclu Hawa Camara de Bangouya.
Richard TAMONÉ pour Billetdujour.com