Pendant le temps de carême l’Eglise nous invite à nous fixer sur l’évènement de la croix. Il faut noter que cet évènement a fait naître un geste devenu le signe du chrétien : c’est le signe de la croix.
Dans cette méditation, j’aimerais que nous nous intéressions à ce signe qui est utilisé chaque jour dans l’Église mais qui perd son sens parce qu’il est simple. Dans notre monde d’aujourd’hui où ce qui est simple semble être banalisé, j’aimerais que nous prenions un petit temps pour apprécier ce trésor de notre vie spirituelle.
Qu’est-ce que le signe de la croix ?
Le signe de la croix est un geste courant pratiquer par des milliards de chrétiens dans le monde. Le signe de la croix se fait par les catholiques et les orthodoxes. Les catholiques touchent le front, la poitrine, l’épaule gauche et la droite. Quant aux orthodoxes, ils font le geste du front, de la poitrine et un mouvement inverse de la droite vers la gauche. Chez les orthodoxes, au moment de se signer, ils resserrent le pouce, l’index et le majeur pour marquer l’unité de la Trinité. Les coptes orthodoxes se signent souvent avec un doigt pour exprimer leur christologie mia phusis c’est-à-dire le Christ est « Une Personne de deux natures ».
Le signe de la croix est-il biblique ?
Beaucoup de frères chrétiens des confessions nées à partir du seizième siècle remettent en cause le signe de la croix parce qu’il n’est pas un geste biblique. Selon des radicaux, c’est une invention de l’Église catholique. Le contenu du signe de la croix est biblique parce que la croix dont nous parlons dans ce signe est la croix du Christ.
La croix est l’instrument de la souffrance, de l’amour de Dieu et de la victoire du Christ sur la mort. Dans le signe de la croix nous reprenons donc le centre de notre foi qui est la mort et la résurrection du Christ. Le signe de la croix est aussi biblique parce que dans ce signe c’est la Trinité qui est mise en évidence. C’est un signe dans lequel nous nous référons au Père et au Fils et à l’Esprit saint (Mt 28,18-20).
Pourquoi le signe de la croix est utilisé surtout par les catholiques, orthodoxes et orientaux ?
En ecclésiologie, nous savons qu’à l’origine il existait une seule Église organisée en pentarchie : Rome, Alexandrie, Constantinople, Jérusalem et Antioche. Ces cinq pôles du christianisme sont des Églises fondées par les apôtres ou par leurs disciples. Les chrétiens de ces Églises ont conservé des habitudes, coutumes et des pratiques des premiers chrétiens. Déjà dès les premiers siècles, les chrétiens se signaient pour marquer leur foi en ce Dieu un et trine. Au XVIème siècle lorsque les divisions sont nées en Occident, pour marquer la rupture avec l’Église catholique, les réformateurs ont remis en cause beaucoup de gestes et signes des premiers chrétiens, ils ont remis en cause la tradition.
Voilà pourquoi beaucoup de gestes et signes n’ont pas été repris par nos frères luthériens, protestants et évangéliques. Ce sont des différences légitimes. Saint Hippolyte de Rome (†235) disait : « Efforce-toi en tous temps de te signer dignement le front, car c’est le signe connu et éprouvé de la passion contre le diable, si tu le fais avec foi et non pour te faire voir des hommes, mais en l’opposant avec science comme un bouclier. En nous signant le front et les yeux avec la main, écartons celui qui essaie de nous exterminer. ». (La Tradition apostolique 42).
Le signe de la croix : une puissance ?
D’un point de vue spirituel, le signe de la croix est un geste qui, lorsqu’il est fait avec foi, protège le chrétien et l’aide dans son engagement dans la société, dans ses activités et dans son combat face à l’ennemi, le diable. Le chrétien qui se signe se couvre avec la puissance des trois Personnes de la Trinité sainte. Par le nom du Père, le chrétien invoque sur sa personne, ses activités et son agir la puissance du Dieu créateur qui fait, défait et refait tout. Par le nom du Fils, le chrétien invoque la puissance salvatrice du Christ, son sang victorieux.
Le chrétien invoque le nom qui guérit, le nom qui protège, le nom qui bénit, le nom qui ouvre les portes et qui débloque tout. En citant l’Esprit saint, le chrétien se couvre avec la force du Paraclet. Il s’ouvre à ses dons et s’abandonne à ses fruits. Le signe de la croix rassure, redonne confiance et permet au chrétien d’avancer sans peur. Selon Jean Marie Vianney: « Le signe de la Croix est redoutable au démon, puisque c’est par la Croix que nous lui échappons ».
Que retenir ?
Le signe de la croix est une profession de foi. C’est un signe qui est différent des signes profanes et ordinaires. Dans ce signe nous invoquons les noms des trois Personnes divines qui sont des noms qui doivent être prononcés avec respect et adoration (Dt 5,11). Le signe de la croix n’est donc pas un signe quelconque que le chrétien fait par mimétisme ou pour des formalités ou pour se donner en spectacle. C’est un signe de foi et nous ne devons pas avoir honte de faire le signe de la croix (Lc 9,26).
Avant de prier, avant toutes sortes d’activités, le catholique est invité à se signer sans honte. Le signe de la croix ne doit pas se faire de manière fantaisiste mais avec sérieux. Ce n’est pas un signe magique mais un geste de foi. En nous signant nous nous couvrons avec le pouvoir de Dieu mais en nous signant nous ne devons pas oublier l’enseignement d’amour du Christ. Celui qui fait le signe de la croix s’ouvre à la bénédiction de Dieu mais s’engage aussi à pratiquer sa parole. C’est pourquoi tout acte spirituel et liturgique chez nous les catholiques s’ouvre par le signe de la croix.
Le catholique qui refuse de faire le signe de la croix ne respecte pas une règle de son Église, alors que lorsqu’on appartient à une famille, la chose qui est simple c’est d’obéir à la petite règle dans laquelle on se reconnaît comme membre de telle ou telle famille. Quand je refuse d’appliquer une règle je me mets en dehors de la communauté au nom d’un relativisme.
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Père Marius Hervé Djadji
Prêtre du diocèse de Yopougon
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